Rokkubiifu 2: Finalement j'aime les huîtres...
Le décalage horaire? Quel décalage horaire?
Je pense que le marathon du voyage et le sommeil en pointillés depuis 20h aident énormément à s'adapter...
Vu la météo qui s'annonce radieuse (merci Marcel) et vu qu'on a décidément besoin de bouger après les 15h coincés derrière un siège, commençons la visite du pays avec Miyajima!
On descend se faire conseiller autour d'un petit déjeuner par Dan et Barb.
La table est basse et les nattes à même le sol.
Je tente la position distinguée à la japonaise, assise sur mes talons, et je craque lamentablement au bout de 5 minutes...
Tant pis pour le dos droit... Il n'est pas compatible avec le muesli...
Il est temps de partir explorer tout ça.
La gare JR de Nishi - Hiroshima est à une 20aine de minutes à pieds... On profite du soleil matinal tout en essayant de ne pas se faire renverser par les vélos qui partagent le trottoir avec les piétons.
Le Japon a beau être le pays de la voiture, les cyclistes ne sont pas en reste... Tant mieux.
On croise quelques grappes d'écoliers dont c'est la rentrée des classes et on se confronte enfin à une gare sans devoir se presser.
Premièrement, passage obligé par la cabine des tickets pour aller faire tamponner le carnet de voyage
(Chaque gare à son propre tampon encreur illustrant les environs) puis il suffit de regarder la destination du train et le quai...
Ajoutez à ça un Pocket Wi-Fi qui marche au poil et le site Hyperdia dans la poche, et prendre le train s'avère beaucoup plus facile que prévu. En gros, ça se résume à regarder l'heure et le numéro de quai.
Les dernières stations nous offrent des vues alléchantes entre montagnes et mer intérieure, et c'est sous un soleil forcément radieux que nous débarquons à Miyajima-Guchi pour prendre le ferry qui va nous amener sur l'île
(Eki Sutampu ga arimasu ka? => Vous avez le tampon de la gare?)
Miyajima est célèbre pour son torii planté dans la mer. C'est d'ailleurs pour ça qu'on avait décidé de caler Hiroshima en début de voyage, because Nouvelle Lune, donc grande marée, donc belles photos!
J'ai envie de dire: "bingo", la mer est au rendez vous, le soleil est éclatant, et Marcel a apparemment décidé de rajouter une corde à son arc et à reculé la floraison des cerisiers d'une semaine juste pour nous!
Nous trouverons d'ailleurs un petit bouddha dans le sable que nous nommerons Maruseru en hommage à toutes les bonnes étoiles qui veillent sur nous.
Au bout de 10 minutes sur Miyajima, je me dis que le reste du voyage à intérêt à être à la hauteur... Y'a du niveau.
On commence par l'ascension du Mont misen qui domine le sanctuaire.
Pour les moins courageux (donc, nous...) un téléphérique prend le relai à mi-chemin pour nous offrir des vues magnifiques sur la mer intérieure tout en ayant les fesses confortablement calées dans la cabine.
Je découvre donc que mon vertige a disparu... Je deviens une warrior: à moi les vols long courrier jusqu'au bout du monde et les grimpettes à flanc de falaise...
Le panorama, certes un peu brumeux, qui nous attend en haut comble toutes les espérances, mais il est un peu envahi de touristes... Il marque donc finalement le point de départ de la randonnée de la journée.
À 10 minutes à pieds se trouve un observatoire un peu moins peuplé de gens et beaucoup plus peuplé de petites statues souriantes qui arborent chacune un bonnet tricoté par les pèlerins.
Une odeur de fumée et d'encens plane dans l'air, le soleil chauffe doucement et on entend des chants d'oiseaux inconnus... La journée commence bien.
Le chemin qui descend ensuite doit nous amener au temple de Daishō-in... Il est apparemment à éviter si vous avez des rotules en carton, étant quasiment uniquement constitué de marches... Je préfère personnellement le prendre dans ce sens plutôt que de le monter.
(Pancarte rassurante libérant instantanément ta paranoïa latente)
Mes compagnons de voyage s'inquiètent de ma santé physique déjà mise à mal par mon grand âge... Leur sollicitude se transforme bientôt en inquiétude pour leur propre condition que divers craquements, ampoules et courbatures viennent sérieusement menacer.
Eh, c'est pas parce que je porte des bas de contention (#traumatisme) que je suis pas capable de descendre une montagne :p
Ou de la monter d'ailleurs.
Après un énième trébuchage / craquement de jointure, un nouveau surnom s'impose: Jiji to Baba (pépé et mémé)... Ils ont trouvé leur nom de blog.
Le sentier serpente terrasse après terrasse jusqu'au temple qui offre une petite balade au milieu des statues encapuchonnées et des érables du japon.
Selon la guide d'un groupe de touristes français, c'est l'anniversaire de Bouddha, ce qui explique le thé gratuit à l'entrée du temple.
On flâne une petite heure sous les érables avant de repartir sur la côte, l'appétit se faisant sentir.
Miyajima est réputée pour ses plats à base d'huîtres et de congres... Mais il est un peu tard et tous les restaurants montrent porte close, malgré des vitrines en plastique toutes plus alléchantes les unes que les autres... (mot du jour: "Si les photos Tinder étaient aussi ressemblantes que les plats des vitrines Japonaises, ça faciliterait quand même bien des choses.")
En désespoir de cause, nous soulevons les noren d'une porte ouverte vers la fin de la rue principale histoire de se caler un creux quand même... pour débarquer sur une petite perle de restaurant avec estrade et nattes pour s'asseoir.
Les udon, riz aux huîtres cuites et la tenpura de congre sont juste à se damner et nous offrent l'occasion de continuer à pratiquer un peu de japonais.
(réflexion personnelle... je maudis sur 50 générations le mec qui a un jour décidé que c'était mieux de cuire les petits pois et de manger les huîtres crues... c'est le CONTRAIRE qui est bon, espèce de gigot fini à la menthe!)
Puis j'ai des envies soudaines de soleil couchant sur Hiroshima et nous bravons le froid et nos courbatures respectives pour descendre à la gare de Shin-hakushima et marcher jusqu'aux douves du château.
Elles sont elles aussi entourées de cerisiers et nous nous perdons en contemplation jusqu'à ce que l'humidité nous déloge et nous renvoie sur le chemin du retour.
En route, nous passons par hasard devant le Genbaku Dôme, une des visites prévues le lendemain, qui marque de sa présence imposante le parc du mémorial de la paix. Little Boy a explosé quasiment à la verticale du bâtiment qui se trouve près du pont Aioi, et dans la nuit, je ne peux pas m'empêcher de lever les yeux et d'imaginer le ciel s'éclairer d'un bout à l'autre...
L'émotion est palpable... Heureusement que les fleurs adoucissent l'atmosphère.
Les Udon brûlants qui clôturent la journée nous réchauffent un peu, physiquement et émotionnellement. Nous gardons la visite de la ville pour demain et sous le soleil.
En Japonais dans le texte:
Maruseru: "Marcel" japonisé... le "r" se prononce comme un "l" au Japon
Noren: rideaux qui marquent l'entrée des restaurants
Udon: pâtes épaisses à base de farine de blé
Tenpura: friture d'à peu près tout ce qui peut se frire...
Genbaku: Bombe atomique